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vendredi 13 septembre 2013

Cyrano de Bergerac, de Edmond Rostand

L'auteur : Le nom d'Edmond Rostand (1868-1918) est maintenant inséparable de celui de Cyrano, au point d'éclipser le reste de son oeuvre. Or, Cyrano de Bergerac (1897) se situe en fait plus ou moins au milieu de la bibliographie de l'auteur, dont les publications s'étalent de 1887 à 1915. Anecdote amusante, l'auteur manquait au départ incroyablement de confiance envers cette oeuvre, au point de s'excuser auprès des acteurs pour les avoir embarqués dans cette aventure juste avant la première représentation. Le succès fut immédiat.

Coquelin dans le rôle de Cyrano

Résumé : Dans la France du 17ème siècle, Cyrano de Bergerac, intrépide capitaine de la compagnie des Cadets de Gascogne, est éperdument amoureux de sa cousine Roxane. Malheureusement, affublé d'un nez qui le rend très vilain, il n'ose lui déclarer sa flamme. Par amour pour elle, il accepte de protéger son rival, le beau Christian de Neuvillette, et va jusqu'à écrire des lettres pour l'aider à séduire la belle Roxane...
(Résumé pris sur la page du format Kindle)

Cette pièce fait partie de ces oeuvres qui ne me manquent pas particulièrement quand je n'y pense pas, mais que je retrouve avec grand plaisir quand l'occasion se présente.
Même si je ne la considère pas comme un chef d'oeuvre (il y a quand même des pièces qui méritent d'avantage cette appellation), son succès est amplement mérité.

Il ne faut pas se voiler la face, ce succès s'explique (exclusivement ?) par le personnage de Cyrano. C'est lui qui incarne le meilleur de ce mélange des genres qu'est la pièce de Rostand. En parlant des genres, ce ne sont pas tout à fait ceux bien déterminés du 15ème ou 16ème. Le romantisme est passé par là, et les barrières commodes entre comique et tragique ne tiennent plus depuis au moins 70 ans au moment de l'écriture de Cyrano de Bergerac. Même le troisième genre - la tragi-comédie, comme Le Cid qui en plus d'être souvent cité a abondamment inspiré certains passages - ne cadre pas. Laissons à l'auteur le privilège de donner une étiquette à son oeuvre et parlons de "comédie héroïque" - quoi qu'en pensent les spécialistes.

Etre difficile à catégoriser et avoir de multiples influences est une force de la pièce. Le comique s'appuie essentiellement sur des mécanismes plus subtils (les quelques emprunts directs à la farce ne sont en général pas vraiment heureux). La dimension tragique ne s'explique pas seulement par un destin malheureux et contre lequel les personnages ne peuvent rien.

L'action en elle-même n'est pas spécialement exaltante. Il s'agit au fond d'une histoire d'amour à sens unique de Cyrano vers sa cousine Roxane. Et finalement ce n'est pas vraiment à cette histoire que l'on accroche. C'est dû au personnage de Roxane, auquel on a bien du mal à s'attacher tant elle est frivole et superficielle au début de la pièce. Il n'y a que dans l'acte IV qu'elle prend un peu d'épaisseur, pour tout de suite la perdre dans le dernier acte. Au fond, les autres personnages n'ont pas plus de relief, et la majorité laissent l'impression d'être des figurants (que dire alors de ceux qui étaient prévus pour être figurants ?).

Ce qui porte la pièce, ce à quoi le lecteur s'intéresse, c'est Cyrano. Rostand a tout misé sur sa version romancée d'une personne qui a vécu au 17ème. Il y est allé à fond, et bien lui en a pris. Ce n'est pas pour rien que le texte du poète bretteur représente plus de la moitié des vers de la pièce. Ce qui explique l'attachement au personnage, c'est sa superbe. C'est son sens de la répartie et sa gouaille qui masquent une sensibilité à fleur de peau et une passion dévorante. C'est son refus du compromis et sa capacité à se tenir à sa ligne de conduite. En un mot, et quitte à spoiler la fin de la pièce, son panache.

                                      Cyrano
J'avais trop de partis, trop compliqués, à prendre ;
J'ai pris...
                                      Le Bret
                Lequel ?
                                      Cyrano
                                 Mais le plus simple, de beaucoup.
J'ai décidé d'être admirable, en tout, pour tout.
(Acte I, Scène 5)

Lecture pour le Big Challenge Livraddict 2013.

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